lundi 12 septembre 2011

Une (op)position sur l'idée d'un manifeste

Plus de six mois après son écriture (et en trichant sur la date de publication dans ce blog), je m'offre la liberté de rendre publique un petit texte qui explique pourquoi je préfère ne pas participer à l'écriture d'un manifeste (ou tout autre texte programmatique) de la R.S.T.Ç. :

Notre chère République Sans Tout Ça est née de la réflexion conjointe d'un petit groupe de personnes rassemblées autour de l'envie de créer ensemble, dans tous les domaines de l'expression. Une idée sur laquelle nous nous sommes rapidement mis tous d'accord fut posée dans l'article premier de la constitution, commun à chaque occurrence de la R.S.T.Ç. :
« Toute loi peut être proposée, modifiée ou abrogée à tout moment par négociation et consensus entre toutes les personnes présentes sur le territoire de la République Sans Tout Ça au moment de cette prise de décision. Le présent article est le seul qui restera immuable à chaque occurrence de la R.S.T.Ç. Quel que soit le lieu et la durée d'apparition de la République. Tous les articles qui suivent ne sont que des propositions à faire approuver à chaque apparition de la R.S.T.Ç. »
On y ajoute souvent l'idée que «Sera Santoussien toute personne qui le désire et le déclare ».

Cet article constitutionnel fondateur, immuable dans son esprit, est pour moi la seule déclaration d'intention générale valable pour la R.S.T.Ç. Tout le reste est à définir pour chaque occurrence de celle-ci, en fonction du contexte et des personnes qui la font naître. Il est cependant bien entendu légitime pour cela de s'inspirer des réflexions antérieures qui ont été menées lors de ses apparitions précédente, ainsi que de tout apport extérieur ou antérieur.

Je défendrais l'appellation « Sans Tout Ça » plutôt que « Avec Autre Chose » (ou toute autre variante), parce que cet autre chose ne manquera pas de naître dès le moment ou on décide d'être sans tout ça. Dès lors qu'on pose l'absence d'une structure de pouvoir hiérarchisé, d'échanges commerciaux monétarisés, etc. dans l'espace occupé par un collectif, il faudra bien que se mette en place un mode de fonctionnement, de vie, d'organisation (aussi informelle qu'elle puisse être). À plus forte raison si on désire y créer collectivement, ce qui a toujours été le cas jusqu'ici et ne devrait pas manquer de l'être à l'avenir sans qu'il soit nécessaire de l'instituer en règle.

Il est donc inutile de définir cet « Autre Chose » et même de le nommer, puisque le principe de base implique une totale dépendance de la structure qui naîtra en même temps qu'une nouvelle R.S.T.Ç. au lieu et aux personnes qui la font naître et la vivent.
Je ne vois pas ce principe comme une « Tabula Rasa » à proprement parler, puisqu'il n'est pas question de nier des influences et prolongations de réflexions posées antérieurement. La R.S.T.Ç. S'inspire ouvertement de mouvements artistiques, utopiques et politiques antérieurs, et poursuit une réflexion sur toutes les composantes de la vie et de « l'être-ensemble ».

Un manifeste, une déclaration d'intention ou tout autre document de ce genre me semble comporter un risque de diviser plutôt que de rassembler et d'en entrainer certains à ne plus se considérer comme Santoussien puisqu'ils ne peuvent adhérer à tel ou tel point du programme. Il ne suffit pas d'offrir à chacun la possibilité de compléter le manifeste pour nuancer ou s'opposer à une idée qui y a été posée précédemment : je vois mal comment on pourrait encore considérer comme programmatique un texte aussi ambigu et contradictoire.

Peut-être pourrais-je adhérer à un tel texte s'il était imprimé « au crayon » (c'est-à-dire avec une encre qu'on puisse gommer, technique qui reste encore à inventer). Mais même dans ce cas, ma première performance serait d'effacer intégralement mon exemplaire...

Je ne souhaite certainement pas nier, bien au contraire, que la R.S.T.Ç. est le lieu idéal pour voir jaillir les échanges d'idées, des positionnements collectifs ou individuels sur celles-ci, des propositions d'organisation sociale, de mode de vie ou de tout le reste, ni les productions qui en découlent. Il faut au contraire en favoriser au maximum le jaillissement, sans le canaliser ni en prédéfinir la direction. L'idée que je me fais de la R.S.T.Ç. m'empêche d'en établir le programme ou même une note d'intention.

Je ne pense pas non plus que d'établir un écrit, même radicalement collectif, puisse nous prémunir contre les prises de pouvoir à l'influence et au charisme. Les différentes parties de ce texte seront elles aussi tributaires de la puissance rhétorique de leurs écrivains respectifs. Il importera donc de trouver d'autres stratagèmes pour désamorcer ce danger.

Si un manifeste devait malgré tout être rédigé, cela ne m'empêchera pas de continuer à me considérer comme Santoussien. Je ne doute d'ailleurs pas que la plupart des idées qui y seraient développées rencontreraient mon approbation. Mais je ne le considèrerai jamais comme un programme, simplement comme une des production collective émanant d'un groupe de Santoussiens, une parmi tant d'autres. Juste une proposition de plus...

1 commentaire:

  1. Cher Gil,

    le Manifeste à Remplir ne se veut pas programmatique, puisqu'il est "à remplir".

    Par contre je ne suis pas sûr qu'on puisse en dire autant de ce message (qui est "tributaire de la puissance rhétorique de son écrivain"... comme tout écrit).

    Et tu as raison de dire que le Manifeste à Remplir est "une production collective émanent d'un groupe de Santoussiens... juste une proposition de plus". À vrai dire, personne n'a jamais affirmer le contraire... si ce n'est toi.

    Pour utiliser des termes Deleuziens, mon espoir en créant et diffusant le Manifeste à Remplir était de "faire rhizome"... Et je sens ici qu'il se heurte à une "segmentarité dure".

    J'espère néanmoins que d'autres propositions dans le futur sauront rencontrer ton approbation mieux que celle-ci. Je m'y appliquerai car malgré tout tu es un grand ami et un magnifique collaborateur.

    Et il n'y a pas de raisons que nos divergences d'idées ne soient pas toutes aussi nourrissantes que nos convergences... Peut-être même plus !

    Bien à toi,
    Antoine.

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